Hier, une conférence de presse a été organisée à la BCD en prévision de la 2e édition du Djibouti FinTech Forum (DFF) qui aura lieu à Djibouti du 18 au 20 juin prochains. Un événement co-organisé par la Banque Centrale de Djibouti et le CTID. A cette occasion, le gouverneur de la BCD, M. Ahmed Osman Ali, et le commissaire général du DFF, M. Samatar Abdi Osman, ont donné un éclairage instructif sur le sujet, en répondant aux questions des journalistes. Compte-rendu.
Questions à M. Ahmed Osman Ali
Gouverneur de la Banque Centrale de Djibouti
Quels sont les objectifs et les ambitions pour cette édition 2024 ?
La seconde édition du Djibouti FinTech Forum est une occasion exceptionnelle pour notre pays de se positionner à l’avant-garde de l’innovation financière. Cette année, nous visons à :
• Catalyser l’innovation technologique : En intégrant des technologies de pointe telles que l’intelligence artificielle, les deeptechs et les projets agiles, nous souhaitons transformer notre écosystème financier. Ces innovations permettront de créer des solutions financières plus rapides, plus sécurisées et plus accessibles.
• Soutenir une communauté dynamique : Nous visons à bâtir un réseau solide d’acteurs publics et privés pour développer une infrastructure financière inclusive. Cela renforcera notre écosystème local et facilitera le développement socio-économique.
• Promouvoir les collaborations stratégiques : Le forum sera un lieu d’échange entre spécialistes, praticiens et utilisateurs de la fintech pour discuter des opportunités et des défis, améliorer la réglementation et établir des partenariats durables.
• Lancer des initiatives clés : En partenariat avec le CTID, nous dévoilerons le tout premier rapport de cartographie des acteurs de la fintech à Djibouti. Ce rapport sera essentiel pour structurer notre écosystème et identifier les opportunités de croissance.
Sachant que notre gouvernement ambitionne de faire de Djibouti un centre financier régional, en quoi les fintechs peuvent-elles apporter des réponses face à cet objectif ?
Pour faire de Djibouti un hub financier international, les fintechs jouent un rôle crucial en apportant des solutions innovantes. Voici comment :
• Inclusion financière : Les solutions fintech permettent d’étendre l’accès aux services financiers pour tous nos concitoyens, les rendant plus autonomes et mieux intégrés socio-économiquement.
• Personnalisation des services : Grâce à l’intelligence artificielle et aux big data, nous pouvons offrir des services financiers hautement personnalisés, adaptés aux besoins spécifiques de chaque client.
• Agilité et efficacité : Les méthodes de développement agile permettent aux fintechs de réagir rapidement aux changements du marché et d’apporter des améliorations continues aux services financiers.
• Sécurité et transparence : Les technologies de la blockchain et les solutions deeptech améliorent la sécurité et la transparence des transactions financières, augmentant ainsi la confiance des utilisateurs.
• Capacité à innover : En exploitant des technologies comme le deep learning et le machine learning, nous pouvons développer des algorithmes avancés pour l’analyse prédictive, la détection des fraudes et l’optimisation des processus.
• Capitaliser sur le franc Djiboutien : En utilisant notre monnaie nationale, nous pouvons proposer des solutions de paiements et des produits financiers compétitifs à l’échelle continentale, en particulier dans le cadre de la Zone de Libre-Échange Continentale Africaine (ZLECAF) de l’Union Africaine.
• Formation des talents : Nous envisageons de développer un pôle de formation de haut niveau pour soutenir le secteur fintech avec des profils très qualifiés, garantissant une expertise locale forte et durable.
Un mot sur l’Islamic Finance Tour Djibouti, qui se tiendra en marge du Djibouti FinTech Forum ?
L’Islamic Finance Tour Djibouti, organisé en marge du Djibouti FinTech Forum, est une initiative clé pour promouvoir la finance islamique dans notre région dans les dimensions suivantes :
• Une Finance durable : La finance islamique est durable et obéit aux règles de la charia, ce qui garantit des pratiques financières éthiques et responsables. Elle est en parfaite harmonie avec notre culture et nos valeurs.
• L’Éducation et sensibilisation : Il vise à éduquer les participants sur les principes et les avantages de la finance islamique.
• Favoriser les partenariats : Il crée un espace pour établir des collaborations entre les institutions financières islamiques et les fintechs locales, ouvrant la voie à des solutions financières conformes à la charia.
• Diversification de l’offre financière : En mettant en avant les produits et services de la finance islamique, nous enrichissons notre marché et le rendons plus inclusif.
En effet, la finance islamique connaît une croissance rapide à travers l’Afrique, avec 40% de la population musulmane et des services désormais proposés dans 21 pays africains. Djibouti, avec son accès portuaire en pleine croissance, ses régulations bancaires progressistes et sa forte connectivité intra-régionale, se positionne comme un hub logistique et financier pour l’Afrique orientale. Le pays a une petite population, mais majoritairement musulmane et une excellente connectivité régionale, lui donnant accès aux populations musulmanes en croissance dans les pays voisins.
La position stratégique de Djibouti a été renforcée par le lancement de la zone de libre-échange internationale de Djibouti de 3,5 milliards de dollars en 2018, qui a augmenté l’attractivité du pays pour le financement du commerce régional. La finance islamique devrait jouer un rôle crucial dans cette croissance. Djibouti a été à la pointe de la finance islamique dans la région, avec des projets réussis comme les ports à conteneurs de Doraleh, qui ont été développés à un coût de 427 millions de dollars et financés par un consortium de banques, dont la Dubaï Islamic Bank et la Standard Chartered Bank, avec une réassurance de la Banque islamique de développement (IsDB).
La finance islamique à Djibouti est principalement composée de banques islamiques (99%) et de micro-finance (1%). La part de marché des banques islamiques a considérablement augmenté, atteignant environ 20% des actifs bancaires totaux de Djibouti, une augmentation substantielle par rapport à 1,6% en 2006. Ce chiffre est nettement supérieur à la moyenne africaine de 5%, faisant de Djibouti le deuxième pays seulement après le Soudan en termes de part de marché des banques islamiques. Le pays compte maintenant quatre banques islamiques sur dix banques en activité, offrant une gamme de produits financiers conformes à la charia aux clients corporatifs et individuels. L’introduction ces dernières années du Takaful et les initiatives en 2022 relatives au développement des produits de microfinance islamiques ajoutent à l’écosystème Djiboutien sa capacité à se positionner comme un hub de la finance islamique en Afrique de l’Est.
De plus, étant donné la structure économique composée de petites et moyennes entreprises ainsi que d’un secteur informel très important, les outils financiers islamiques tels que la Zakat, le Waqf, le Micro-Takaful, etc., apparaissent comme une alternative pour financer l’économie sociale, coopérative et artisanale. Cela constitue un excellent moyen pour stimuler l’inclusion sociale et financière à Djibouti.
Malgré cette croissance, il reste encore des défis à relever pour l’écosystème de la finance islamique à Djibouti. Et ce sont là des questions qui seront mis en relief lors de cet Islamic Finance Tour Djibouti.
Questions à M. Samatar Abdi Osman
Commissaire général du DFF / DG du CTID
En tant que commissaire général du DFF, que pouvez-vous nous dire sur cet événement DFF24 ?
DFF24 est le fruit de notre engagement à encourager l’innovation dans les domaines de la finance et de la technologie à Djibouti. Cette année, nous mettons un accent particulier sur :
• Les Big Data et l’Intelligence Artificielle : Ces technologies sont des leviers essentiels pour dynamiser notre économie et améliorer l’accès aux services financiers.
• Collaboration avec la Banque Centrale : La co-organisation avec la BCD démontre l’importance stratégique de la fintech dans notre écosystème financier.
Pouvez-vous nous dire un peu plus sur le déroulé de l’événement et les résultats attendus ?
Le déroulé de DFF24 inclura :
• Conférences et panels : Des discussions avec des experts mondiaux sur les dernières tendances et innovations en fintech.
• Ateliers pratiques et MasterClasses : Des sessions interactives pour explorer des solutions concrètes et innovantes, notamment en matière de Big Datas et d’Intelligence Artificielle.
• Expositions : Une vitrine pour les entreprises locales et internationales afin de présenter leurs produits et services fintech.
Les résultats attendus sont :
• Renforcement des connaissances : Une meilleure compréhension des défis et opportunités dans le secteur de la fintech.
• Nouveaux partenariats : Établissement de collaborations stratégiques entre les acteurs locaux et internationaux.
• Progrès technologiques : Adoption et intégration des technologies de pointe pour améliorer notre écosystème financier.
• Solutions continentales : Capitaliser sur les avantages de la monnaie nationale, le franc Djibouti, pour proposer des solutions de paiements et des produits financiers dans le cadre de la ZLECAF de l’Union Africaine.
Un mot sur les perspectives ?
Les perspectives sont très prometteuses :
• Innovation continue : Nous envisageons une innovation constante dans le secteur fintech pour répondre aux besoins évolutifs de notre économie.
• Expansion régionale : Faire de Djibouti un centre financier régional reconnu pour son dynamisme et son innovation.
• Impact socio-économique : En favorisant l’inclusion financière et l’autonomisation économique, nous espérons stimuler une croissance économique durable et inclusive.
• Formation de haut niveau : Développer un pôle de formation de haut niveau pour soutenir le secteur avec des profils très qualifiés, garantissant ainsi une expertise locale forte.